Destitué mercredi, Pedro Castillo est désormais en détention provisoire après sa tentative de « coup d’État ». S’il est le dernier, il n’est pas le premier chef d’État péruvien victime de cette tension permanente entre le Congrès et le pouvoir exécutif. Depuis quatre ans, six présidents se sont succédé au palais présidentiel de Pizarro. (RFI)
La crise est morte, vive la crise ! C’est le sentiment de nombreux Péruviens qui ne s’attendent pas à ce que retombe la température politique, portée à ébullition cette semaine après la destitution par le Congrès de Pedro Castillo mercredi. L’ex-président a été placé en détention provisoire pour une semaine. Il est poursuivi pour « rébellion » et « conspiration ».
Investie à sa place, sa vice-présidente, Dina Boluarte, est donc la sixième présidente du Pérou depuis 2018 (Pedro Pablo Kuczynski, Martín Vizcarra, Manuel Merino, Francisco Sagasti et Pedro Castillo). Mais pourquoi le Pérou est-il si difficile à diriger ?
Le système politique n’est d’abord pas fait pour faciliter la gouvernance du Pérou. Les élections législatives ont lieu avant la présidentielle, ce qui complique l’émergence de majorités de gouvernement d’autant que les partis politiques traditionnels ont été remplacés par des groupes chaque fois plus petits ne répondant qu’à des intérêts particuliers.
« Incapacité morale »
La Constitution de 1993 affaiblit également le chef de l’État qui peut être destitué pour « incapacité morale ou physique permanente ». À l’origine, il s’agissait de se donner la possibilité de retirer du pouvoir une personne souffrant par exemple d’une maladie mentale l’empêchant de remplir ses fonctions.
Le problème, c’est que ce concept d’« incapacité morale » n’a jamais été clairement défini. Il est donc utilisé à leur guise par les députés pour destituer des présidents accusés par exemple de corruption mais pas encore condamnés par la justice et donc officiellement innocents. Il leur suffit de rassembler 87 votes sur 130 pour suspendre en permanence une épée de Damoclès sur la tête du chef de l’État. Ce dernier a la possibilité de dissoudre le Congrès si les députés refusent deux fois leur confiance à un cabinet ministériel, mais il n’en reste pas moins en permanence sur la sellette s’il n’a pas de majorité.
Dina Boluarte saura-t-elle éviter le sort de ces prédécesseurs ? Elle est aujourd’hui la première femme présidente du Pérou mais personne ne s’aventure à prédire pour combien de temps.
Les partisans de Pedro Castillo crient à l’injustice
En attendant, quelques centaines de manifestants pro-Castillo se sont encore réunis devant le centre pénitentiaire où il est détenu, près de Lima, et dans le centre-ville de la capitale, plaza San Martin, jeudi après-midi. Ils refusent de reconnaître la légitimité de la nouvelle présidente et réclament la libération de l’ex-président. Des protestations ont eu lieu aussi dans la région d’origine de l’ancien président.
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RFI