Condamnation inédite de Nicolas Sarkozy : 5 ans ferme pour financement libyen. Entre Kadhafi trahi et Gbagbo bombardé, l’Histoire se venge.
La condamnation de Nicolas Sarkozy à cinq ans de prison ferme dans l’affaire du financement de sa campagne présidentielle par la Libye résonne comme un tremblement de terre. Jamais dans l’histoire de la Ve République un ancien président n’avait subi un tel revers judiciaire. Mais derrière le choc, certains y voient une justice tardive, presque symbolique.

Car il s’agit bien d’argent libyen, celui du guide Mouammar Kadhafi, que Sarkozy aurait sollicité pour conquérir l’Élysée. Ironie tragique : c’est ce même Sarkozy qui, en 2011, fut en première ligne de l’opération militaire de l’OTAN qui a précipité la chute et la mort du dirigeant libyen. L’ingratitude a rarement été aussi brutale : recevoir des fonds d’un allié pour ensuite conduire la coalition qui l’a abattu. Aujourd’hui, beaucoup estiment que l’âme de Kadhafi peut enfin reposer en paix.
Mais la portée de cette affaire dépasse la seule Libye. En Côte d’Ivoire, le nom de Sarkozy évoque encore des plaies ouvertes. C’est lui qui, la même année 2011, fit bombarder la résidence présidentielle d’Abidjan pour déloger Laurent Gbagbo, au profit de son ami Alassane Ouattara. Dix ans de prison injuste pour l’un, accession triomphale pour l’autre : ce fut le prix de l’ingérence française. Dès lors, comment ne pas imaginer que Laurent Gbagbo, acquitté par la CPI après des années d’épreuves, puisse accueillir avec une forme de satisfaction cette nouvelle qui frappe son ancien bourreau ?

Derrière cette condamnation se cache donc une double revanche de l’Histoire. Revanche pour Kadhafi, trahi et assassiné par celui qu’il avait financé. Revanche pour Gbagbo, humilié et chassé du pouvoir par la force militaire française. La justice française a peut-être jugé Sarkozy pour des raisons internes, mais aux yeux de beaucoup en Afrique, c’est le retour du boomerang, la démonstration qu’aucun dirigeant, fût-il président de la République française, n’échappe éternellement à ses fautes.
L’affaire Sarkozy n’est plus seulement un scandale politique : elle devient une leçon universelle. L’Histoire, parfois lente, sait punir l’ingratitude et rappeler que nul n’est au-dessus des lois.
Germain Sehoué
































