En écartant Laurent Gbagbo de la présidentielle, Alassane Ouattara ignore ses propres mises en garde. Un danger pour la Côte d’Ivoire ?
Dans les années 1990 et 2000, Alassane Ouattara dénonçait avec force l’exclusion politique en Côte d’Ivoire, estimant qu’elle était une menace pour la paix. Il en avait fait un cheval de bataille lorsqu’il luttait pour son éligibilité.
À cette époque, son exclusion du processus électoral avait été l’un des prétextes à la rébellion armée du MPCI, rebaptisée plus tard Forces Nouvelles, dirigée par Guillaume Soro. Cette crise a plongé le pays dans le chaos pendant huit longues années.
Aujourd’hui, l’histoire semble se répéter, mais dans un tout autre rôle. Laurent Gbagbo, ancien président et principal adversaire politique, est écarté de la liste électorale par la volonté du chef de l’État.
Après dix ans d’incarcération, d’abord en Côte d’Ivoire, puis à la CPI et en Belgique à ciel ouvert, Gbagbo se retrouve privé de ses droits civiques. Pourtant, toutes les grandes voix du pays et même des acteurs internationaux appellent Alassane Ouattara à revoir sa position.
Le paradoxe est frappant : celui qui dénonçait hier l’exclusion l’impose aujourd’hui à son adversaire. En privant Gbagbo de la possibilité de concourir, Alassane Ouattara prend-il le risque de rallumer des tensions ? La Côte d’Ivoire a déjà payé un lourd tribut en 2010-2011, avec plus de 3 000 morts dans la crise post-électorale.
La situation actuelle alimente les inquiétudes. Qui pourra convaincre Alassane Ouattara de revenir sur cette décision ? Si la paix et la réconciliation sont réellement des priorités, ne devrait-il pas éviter de créer les conditions d’un nouveau conflit ?
S’il vous plaît, parlez à Alassane Ouattara.
Germain Séhoué