Dans la nuit du 11 au 12 mai 2023, les leaders des deux camps belligérants au Soudan ont signé un accord pour autoriser l’accès de l’aide humanitaire. Ce n’est pas encore un cessez-le-feu, tout juste une déclaration d’engagement à protéger les civils, précise un responsable américain ayant pris part aux discussions. La veille, plusieurs spécialistes de la région ont fait part à RFI de leurs doutes sur la sincérité du chef de l’armée, le général al-Burhan, et celle du chef des Forces de soutien rapide, le général Hemedti, concernant ces négociations. (RFI)
Les négociations se poursuivent pour obtenir une nouvelle trêve temporaire au Soudan où les combats font rage depuis le 15 avril, afin de permettre l’acheminement de l’aide, avec une proposition visant à arrêter les affrontements pendant dix jours, a déclaré un responsable américain, sous couvert d’anonymat.
Concrètement, les deux parties s’engagent à laisser entrer l’aide humanitaire, à autoriser le rétablissement de l’électricité, de l’eau et d’autres services de base, à retirer les forces de sécurité des hôpitaux ainsi qu’à organiser un « enterrement digne » aux morts.
Selon une source américaine, les deux camps étaient toujours « assez éloignés ».
« Les deux belligérants ne sont pas prêts à faire de compromis »
Ces discussions – sous l’égide des États-Unis et de l’Arabie saoudite – ont démarré dans la ville saoudienne de Djeddah, le 6 mai 2023. Chaque camp y a envoyé une délégation de trois personnes. Mais jusque-là, les discussions ont été difficiles, les progrès lents de l’avis des observateurs, qui sont plutôt sceptiques.
À l’ordre du jour de ces discussions, obtenir un cessez-le-feu, mettre en place un mécanisme de contrôle et ouvrir un corridor humanitaire.
Pas question pour l’instant de quelconques discussions politiques. « Les deux belligérants ne sont pas prêts à faire de compromis », estimait la veille de l’accord le chercheur Alex de Waal. « Chacun est convaincu de pouvoir défaire son rival sur le terrain militaire », ajoutait-il. D’où les combats acharnés de ces quatre dernières semaines.
En envoyant une délégation à Djeddah, expliquait un autre chercheur, Cameroon Hudson, « les deux généraux veulent surtout faire bonne figure auprès de la communauté internationale. Et gagner du temps pour consolider leurs positions. Mais il n’y a pas de véritable volonté de négocier ».
« D’ailleurs, les différentes déclarations des derniers jours ne sont pas de bon augure, soulignait le spécialiste Gerritz Kurts. Il y a quelques jours, un proche du général Burhan affirmait que ces discussions de Djeddah avaient pour but de faire partir les Forces de soutien rapide de Khartoum et de rendre le général Hemedti responsable de cette crise ».
« Difficile d’envisager un arrêt durable des combats »
« Difficile dans ce contexte de rivalité et de méfiance d’envisager un arrêt durable des combats », concluait Alex de Waal, qui ajoutait que les deux généraux subissent de très fortes pressions de la communauté internationale, notamment des États-Unis.
Il y a une semaine, le président américain Joe Biden signait un nouveau décret visant à sanctionner les personnes qui menacent « la paix, la sécurité ou la stabilité » au Soudan, affirmant que la violence dans le pays « doit cesser ».
« Les seuls points sur lesquels les deux généraux soudanais sont d’accord, ajoutait Alex de Waal. C’est qu’ils ne veulent pas d’un gouvernement démocratique avec des civils. » Et de conclure : « Et ils veulent une amnistie pour les crimes de guerre. »