La mauvaise foi est un art. Et le RDR ou RHDP en a le magistère. Dans les débats démocratiques auxquels s’invite cette formation amie des armes et de la force désolante, il n’est pas rare d’entendre : Gbagbo a fait dix ans au pouvoir et il n’a rien fait pour les jeunes, ou il n’a rien fait dans tel ou tel domaine… mais voyez les réalisations d’Alassane Ouattara…
Quand j’entends pareils discours, mes oreilles me démangent fortement et mon âme est en ébullition. Et cela, pas que je sois gbagboïste éperdu, mais parce que j’aime la vérité et la justice. J’étais là !
Pourquoi cela mérite qu’on en parle ? Parce que, pendant ces dix ans de Gbagbo que ces gens comparent complaisamment au bilan de Ouattara, où étaient-ils et que faisaient-ils, eux-mêmes ?
Pendant ces années-là, depuis le 19 septembre 2002 jusqu’après la chute de Gbagbo le 11 avril 2011, eux-mêmes, ou leur rébellion sanglante s’activaient à zigouiller les pauvres populations, à piller l’économie.
L’ambiance était-elle une ambiance de développement ou de sécurisation de la Nation ? On était dans une ambiance de terreur et d’effroi. Une atmosphère créée par les accusateurs d’aujourd’hui. Des femmes enceintes et des enfants étaient éventrés par des rebelles assoiffés de sang. La peur régnait. Les exodes étaient massifs. Des régions entières se vidaient, fuyant la barbarie d’une autre race humaine. J’étais là. Ma région a été déshumanisée. D’autres aussi ont souffert de cette méchanceté.
Mais pendant toutes ces années du pouvoir Gbagbo, les pourvoyeurs de l’insécurité, de la désolation et du chaos étaient dans son gouvernement. Or, ils régnaient sur la moitié centre-nord-ouest de la Côte d’Ivoire qu’ils pillaient aisément. Un manque à gagner de milliers de milliards de francs pour le pays.
Mais cela, ils n’en parlent pas aujourd’hui et n’en tiennent pas compte dans leurs analyses et grilles de comparaison.
Aujourd’hui, le pouvoir est en roue libre. Aucune contestation. Le pays est entier. L’Opposition est pacifique, presque inexistante. Pis, un citoyen qui accompagne au tribunal un proche convoqué par la justice, peut être arrêté et jeté en prison. La justice des vainqueurs et le réflexe pour la prison sont devenus un mode de gouvernement.
C’est pourquoi, il est indécent de faire des comparaisons qui réveillent des douleurs.
Le bilan de quelqu’un qui bénéficie d’une paix absolue, de l’entièreté du territoire national, des ressources financières du pays, qui, en plus, a endetté le pays au-delà de l’imaginable, ce bilan devrait avoir l’humilité de se taire, de se mettre au garde-à-vous, face à celui de Laurent Gbagbo occupé à éteindre le feu. Le feu que le RDR a allumé en Côte d’Ivoire. Les deux bilans ne se sont pas réalisés dans les mêmes conditions de température et de pression.
Depuis quand a-t-on vu des sapeurs pompiers éteindre le feu d’un immeuble et accompagner à la fois les enfants de cet immeuble à l’école ? Depuis quand ?
Mais, même embarrassé, Laurent Gbagbo a fait tout de même des prouesses avec des budgets sécurités.
C’est pourquoi, les pyromanes doivent avoir la prudence d’éviter certains sujets ou de les aborder avec toute la mémoire qu’exige la réconciliation. En ce sens que, pendant les années de son pouvoir, Laurent Gbagbo était essentiellement occupé à éteindre le feu du RDR. Occupé à lutter contre la rébellion sanglante du RHDP d’hier, à se préoccuper de la sécurité de son peuple.
Face à la mauvaise foi, on est obligé de réagir, de temps en temps. Dieu nous garde.
Germain Séhoué